Nos pieds engourdis tombèrent dans l’étang
Seconde édition (première édition juillet 2018).
Le premier livre de Sandra Naji est un poème narratif en 13 vues, narrant les aventures de ses personnages dans une nature animée. D’abord, il y a l’étang. Là, un enfant chasseur esseulé recherche son cheval. Plus loin, huit femmes voient leurs pieds tomber au fond de l’eau… Ce livre est un outil d’observation proposé à l’œil enfantin, outil d’un genre ancien et futuriste en même temps.

Nous nous trouvons à l’origine de nos contes. Parlons conte, car nous employons ses ingrédients à notre sauce : bestiaire, métamorphose masque ou costume, succession des générations, vieillesse, moralité ou transgression, épreuves symboliques, créatures et objets merveilleux… Glissons dans le conte moderne (ou la légende bricolée), mais glissons-y avec nos pieds, nos mains, nos yeux qui sont nos moyens d’expérimentation : nos protagonistes peuvent marcher, dessiner, chantent, sculpter… et trouvent dans leur environnement les matériaux de construction de leurs aventures* ; ils transforment le cours de leurs récits en déplaçant un morceau de plastique ou en en brisant une pierre... À l’intérieur de nos livres se fabriquent des contes. Il manque des éléments de fond, mais quoi ?

À propos
L’étang : borgne à l’œil trouble, catarrheux, hypnotiseur professionnel, gueule insatiable qui avale tout ce qui passe à sa portée, notamment filles et garçons, en commençant par les pieds (sont les premiers à tomber en hypnose, ainsi : plouf) ; (d’une façon générale l’eau a toujours su hameçonner le pêcheur).
Cette lenteur !! C’est un piège… on n’a jamais vu prédateur plus redoutable. Lourdaud, pataud, ensommeillé, liquoreux, l’antithèse du guépard (pourtant : un tableau de chasse incomparablement plus fourni !). (et des humeurs de dyspepsique ! de rudes fleurs digestives éclosent chaque seconde). Vaille que vaille, donc, l’étang mange l’étant, ses dents molles sont infatigables.
CEPENDANT : Etang : Vase de vase, réflecteur chiche, duplicateur mineur, donc : artisan honnête de simulacres, miroir sans le bling-bling menteur des lacs alpestres — son gros verre soigneusement dépoli montre ce qui passe comme il convient de montrer ce qui passe. Le petit d’homme s’y aperçoit sans boniment : Sandra Naji m’a fait la grande joie de m’envoyer par voie postale son magnifique premier livre, un vrai récit de la grande Belgique mentale (notamment), intitulé NOS PIEDS ENGOURDIS TOMBERENT DANS L’ETANG (il y est aussi question de vesses-de-loup géants, de montagnes à mouches hautes de 3 mètres, de petits poucets piégés par des cailloux (!)).
Onje ne saurait trop vous conseiller de le lire au plus vite (cela dit il ne sera pas évident de dénicher cette rareté : bonne chasse !). Philippe Crab, 2018.

Autres documents :
Écoute de la présentation de 2018.
Extrait (un)
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